Arène.

École primaire.
Cour de récréation.
Fin d'après-midi.
Elle me poursuit.
Je ne sais pas pourquoi.
Dans ses yeux noirs, je lis une bestialité qui m'est inconnue. Je n'ai jamais vu ça. Je n'ai jamais ressenti ça, même. Ce qui me force à courir, fuir.
La peur. La terreur.
Sentiment d'horreur.
J'ai peur d'une enfant de sept ans. J'en ai huit, à peine.
Elle me terrorise.
Elle est là, à grogner comme un animal, à me poursuivre. Elle ne me laisse pas un instant de répit.
Je suis comme une proie.
Je suis sa proie.
Moi, celle qui l'a accueillie à bras-ouverts, qui l'a prise sous mon aile.
Et elle me course. Elle n'arrête pas.
Je suis hantée par cette ronde, cette course-poursuite. J'ai l'impression d'être dans une arène. La Bête veut ma peau. Je ne me souviens pas de ce que j'aurais pu faire pour réveiller une telle colère. Je me souviens juste de son regard brûlant de haine, du rictus effrayant qui borde ses lèvres.
Je vois une surveillante, je m'accroche à elle, la supplie de mes yeux larmoyants de faire arrêter ça. Elle se dégage de mes mains tremblantes, soupire de lassitude. "J, laisse-la tranquille." Qu'elle marmonne.
J ne me laisse pas tranquille. La surveillante s'en fout.
Je suis obligée de reprendre ma course pour y échapper.
Ça a fini par s'arrêter. Je ne sais pas comment.
Je ne sais même pas pourquoi. Je ne sais pas pourquoi ça a commencé. Je ne sais pas comment j'ai pu attiser une telle haine, une telle rage. J m'a coursée ce jour-là, souvenir qui me perturbe encore, onze ans après. Malgré l'absence d'explication, j'ai pardonné. À notre entrée au collège, tandis que je lui offrais toujours mon amitié et ma confiance, elle a retourné une populasse adolescente entière contre moi.
Rumeurs. Mensonges. Manipulations. Harcèlement. Humiliations. Et autre.
Pourquoi ?
Je ne saurai jamais.